Ashlyn Harris – la fierté jusqu’au bout des doigts

Elle a porté le brassard de capitaine pour l’une des dernières franchises à être entrée en jeu au sein de la National Women’s Soccer League, l’Orlando Pride. Plébiscitée par les fans à de nombreuses reprises, Ashlyn Harris a décidé de donner un sens particulier à sa carrière de gardienne. Retour sur le parcours de celle qui sauve bien plus que des tirs. 

Une lionne dans les cages

Harris naît à Satellite Beach, en Floride. Elle y grandit avec son frère, Chris. Les batailles quotidiennes de sa famille marque Ashlyn. Que cela soit dans l’obtention de bons alimentaires tout comme l’absence de leurs parents, à cause des rotations professionnelles inlassables pour tenter de leur offrir une enfance décente. Cela se solde par un divorce chaotique qui affecte beaucoup les enfants Harris : Chris le prend très mal et, pour Harris, la seule solution a été la fuite en avant. Elle se consacre corps et âmes au football, sa clé d’entrée dans des sphères qu’elle n’aurait pu atteindre autrement : c’est ainsi qu’elle peut rejoindre l’université de Caroline du Nord, où elle jouera sous la coupe du légendaire Anson Dorrance, ancien coach de l’USWNT qui remporta la première Coupe du Monde en 1991. 

Gardienne physique qui apprécie les duels, elle remporte la Coupe du Monde U23, avant d’être convoquée en équipe Senior, remporte deux fois le championnat de la NCAA avec les Tar Heels, et le championnat de la WPS avec le Western New York Flash. Elle passe par une expérience en Europe, à Duisbourg en Frauen Bundesliga, et au Tyresö FF, en Suède, à l’époque où d’autres joueuses de l’USWNT sont aussi dans l’équipe, Press, Klingenberg, Krieger. Gardienne titulaire du Washington Freedom puis du Washington Spirit aux USA, elle participe à la fondation de la franchise d’Orlando, l’Orlando Pride. La native de Floride devient rapidement une figure de proue de la franchise, même si elle cède, sur blessure, son brassard à Ali Krieger. Elle remporte régulièrement en NWSL le titre du « save of the week » et d’aucuns diront qu’Harris les obtient plus parce qu’elle fait partie des joueuses préférées, que par le côté spectaculaire de ses arrêts. 

Après l’élimination d’Hope Solo suite à ses propos déplacés contre l’équipe de Suède, Harris se dispute la place de titulaire avec la gardienne des Chicago Red Stars, Alyssa Naeher. Si Jill Ellis semble avoir jeté son dévolu sur une gardienne avec moins de leadership mais qui prend moins d’initiative risquée, Harris ne baisse pas les bras : l’objectif est de faire la sélection pour France 2019. 

Faire la différence

Chausser des gants est une chose. Mais l’histoire personnelle d’Harris l’inspire à être beaucoup plus. La souffrance, les luttes, les maladies mentales comme les addictions et la dépression lui sont familières. Alors, elle utilise son sport comme une plateforme. Elle ose s’exprimer, rappeler que c’est important d’en parler, de ne pas avoir honte. Et surtout de montrer que « c’est okay de ne pas aller bien », en ses propres termes. Elle ne reviendra chez elle, en Floride, que lorsque sa mère sera devenue sobre.

« Avoir de vraies discussions à ce propos m’a fait grandir et progresser, sur le chemin du pardon et de l’acceptation. Et parce que TWLOHA m’a aidée, je suis désormais capable d’aider les autres. » – Ashlyn Harris

Et ce n’est que le début du chemin de la rédemption. Elle s’associe avec Jamie Tworkowski et devient une des ambassadrices de l’association « TWLOHA », « To Write Love on her Arms », qui aide les personnes luttant contre la dépression et ses effets dévastateurs. « Grâce à ce que j’ai appris avec TWLOHA, j’ai beaucoup mûri. J’ai désormais une meilleure compréhension de l’addiction et de la dépression », confie-t-elle à Ambitious. « Avoir de vraies discussions à ce propos m’a fait grandir et progresser, sur le chemin du pardon et de l’acceptation. Et parce que TWLOHA m’a aidée, je suis désormais capable d’aider les autres. » Humble, la gardienne de l’Orlando Pride l’est : « Ces discussions sont si dures, on préfère les éviter ou les mettre de côté. J’ai toujours voulu être honnête. Raconter mon histoire n’a d’intérêt que si les gens peuvent s’y reconnaître ou s’y identifier. Et je crois qu’au fil des années, les gens ont senti la connexion qu’ils pouvaient avoir entre leur histoire et la mienne. Et ce que je retiendrai de tous ces titres, de tous ces championnats, du Victory Tour et de la Coupe du Monde, ce n’est finalement que les gens que j’ai pu rencontrer et avec qui j’ai pu échanger. Les entendre me dire « j’étais en train de lutter et tu as changé ma vie », cela dépasse toutes les médailles d’or du monde. », raconte Harris au micro de Women’s Soccer France.

12 juin 2016 dans le coeur

Sa mission ne s’en tient pas uniquement à la santé mentale. Ashlyn Harris s’est également faite la voix des jeunes LGBTQA+ opprimés. Si elle est la première à s’emparer des réseaux sociaux pour protester conter un acte homophobe ou transphobe, notamment lorsque Aniya Wolf, une jeune adolescente, se voit interdire l’accès au bal de promo de son école, parce qu’il porte – et très bien en plus – un costume, dress code traditionnellement masculin. Ashlyn Harris s’empare de l’affaire et participe à sa médiatisation. Harris a toujours eu au coeur ce soutien aux causes LGBTQA+, à l’égalité et à la fin des discriminations. 

Ce qui s’est passé le 12 juin 2016, lors de la fusillade du Pulse à Orlando, laissant 50 victimes, 49 innocents et un terroriste dans la seconde fusillade la plus meurtrière de l’histoire des USA, laisse une marque indélébile dans l’esprit d’Harris. Elle portera le maillot aux couleurs arc-en-ciel pendant le mois des fiertés Américain, rendra hommage aux victimes – notamment lors d’un Washington – Orlando lourd en émotions, où le match a été suspendu à la 49e minute – et poursuivra son combat contre les discriminations avec d’autant plus de ferveur que c’est aussi sa ville qui est meurtrie. 

Role model impeccable, vocale et audacieuse, Ashlyn Harris marque son engagement à travers son attitude, son ouverture avec les fans, son franc-parler. Et son humilité par rapport à des combats qui sont plus grands que simplement porter le maillot et le blason Américain. 


Crédit image : Ashlyn Harris / instagram // Women’s Soccer France / Orlando City SC / Stephen M. Dowell/Orlando Sentinel

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