Le salaire de la joueuse (1/4)

Il y a sept mois, les joueuses de l’équipe nationale australienne refusèrent de se rendre aux États-Unis pour y disputer deux matches contre les championnes du monde en titre. Retour sur les ondes de choc provoquées par ce mouvement de grève à sensation, et sans précédent dans les annales du sport féminin.

 

 

Il y a sept mois, en signe de protestation contre leurs conditions de travail, les joueuses de l’équipe nationale australienne (alias les Matildas) refusent de se rendre aux États-Unis pour y disputer deux matches contre les championnes du monde en titre.

 

Grèves à gogo

Question débrayage sur les terrains de sport, l’équipe de baseball américaine des Detroit Tigers avait ouvert la voie en boycottant un match. Motif : la suspension de son joueur vedette, Ty Cobb, accusé d’avoir tabassé un supporteur après s’être fait traiter de ‘demi-nègre’. C’était en 1912. Il faudra attendre les années 70 pour assister aux premières revendications salariales en matière de sport, tel ce mouvement de grève généralisé orchestré dans la Ligue américaine de baseball (MBL). Á la même époque, exhortées alors par Billie Jean King (*), un groupe de neuf tenniswomen (The Original 9), menaçaient, elles aussi, de tourner le dos à certains tournois du Grand Chelem. Dans leur cas, il n’était pas question d’augmentation de salaire mais de parité. Nuance.

 

Le triathlon à l’honneur

Il aura toutefois fallu attendre plus de trente ans pour que les dotations deviennent enfin identiques entre hommes et femmes sur toutes les levées du grand chelem (**). Ce qui n’est pas le cas sur les autres tournois du circuit. Selon une enquête réalisée en 2011 par ESPN, en terme de gains chez l’élite toutes disciplines confondues, le rapport serait sur les cours de 1 pour 2. Le tennis à égalité avec l’équitation, derrière le ski alpin et le Beach Volley. La chaîne américaine révélant que la parité n’existe finalement qu’au triathlon. Quant au ratio concernant le football, celui-ci serait au bas mot de 1 pour… 1000. En parfaite adéquation avec le montant des droits TV pratiqués.

 

Premières de cordée pour les Matildas

En septembre dernier, séduisantes quart de finalistes du dernier Mondial, les Maltidas osèrent demander que leurs salaires fédéraux soient revus à la hausse lors du renouvellement de la convention collective en place et expirée depuis déjà deux mois. Jusqu’ici les filles aussies percevaient un montant annuel largement inférieur à celui du SMIC australopithèque : 21.000$ contre 32.000$. Ce jour là, elles espéraient bien le voir doubler. En vain. Devant l’échec des négociations, écoeurées par le manque d’égards affiché par la fédération de football australienne (Fédération Football Australia, ou FFA), quasiment à l’unanimité (seule la capitaine Lisa De Vanna votera contre cette grève) les Maltidas déclenchèrent alors sans préavis une cinglante action revendicative, refusant d’honorer deux matches aux États-Unis contre les championnes du monde. Leur fronde à sensation finira par payer. Et au mois de novembre, elles obtiendront gain de cause (voir Volet II pour les détails).

 

Effet boule de neige chez les Transalpines

Probablement stimulées par la tactique de leur homologues aussies, au coup d’envoi du championnat (la Serie A) qui devait être donné le 17 octobre, les joueuses italiennes menacèrent de faire grève et le programme de la première journée fut modifié alors que la fédération italienne (FICG) tergiversait et prenait son temps pour officialiser par écrit un accord avec les joueuses (***). Là encore, la fronde des joueuses portera ses fruits puisque le document écrit était reçu vers 12h le 17. En revanche, les deux parties en présence furent incapables de s’accorder sur « lo vincolo sportivo » (****), une règle qui empêche toute joueuse amateur de pouvoir changer de club avant l’âge de 25 ans. Quoique là, pour changer, en Italie les représentants des deux sexes sont logés à la même enseigne !

A noter que les Etats-Unis sont également touchés par ces protestations salariales, et les joueuses de la sélection sont en pleine bataille pour obtenir l’égalité des salaires avec leurs homologues masculins.

 

 

(*) Le 7 mars, au siège de la FIFA, l’ex-championne de tennis américaine sera présente en qualité d’intervenante à la deuxième édition d’une conférence consacrée au football féminin intitulé « L’égalité par le biais de réformes ». Tout un programme.

(**) La parité a été introduite dès 1973 à l’US Open et en l’An 2000 sur l’Open d’Australie, alors que les tournois de Roland-Garros et de Wimbledon n’y souscriront qu’à partir de 2007.

(***) Possibilité de signer des contrats pluriannuels, allocation de 500 000 euros pour le prochain budget fédéral en soutien à l’activité des féminines (dont 50 000 euros de fond de garantie).

(****) Dire que jusqu’en 2005, il n’existait alors aucune limite d’âge !

 

 

Crédit photo : WTA, Brescia

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