La NWSL sur le chemin de la stabilité ?

La fin de la 3e saison de NWSL approche. Moment fatidique de la WUSA et la WPS, la NWSL va-t-elle pouvoir capitaliser sur le titre mondial obtenu en 2015 pour se construire un avenir stable ? Point sur la situation actuelle, en comparaison avec ses prédécesseures, et sur son avenir potentiel

 

 

 

En 1999, les Etats-Unis remportent leur deuxième Coupe du Monde. Un succès qui donne des idées, et l’année suivante voit la création de la première ligue de football féminin professionnelle au monde, la Women’s United Soccer Association (WUSA). Disputée de 2001 à 2003, elle disparaît ensuite pour raisons financières. Rebelote en 2007, une nouvelle ligue est créée, la Women’s Professional Soccer (WPS). Elle débute en 2009, et se déroule également pendant trois saisons, disparaissant ensuite également pour des raisons financières principalement.

Si deux ligues, la Women’s Premier Soccer League et la W-League, créées respectivement en 1997 et 1995, sont toujours en place, il s’agit plus de ligues de développement où peuvent évoluer notamment des joueuses universitaires, aux côtés de joueuses plus expérimentées, notamment entre deux ligues pro. Des équipes réserves de NWSL y évoluent désormais.

Après l’arrêt de la WPS, annoncée fin 2012 (la saison 2012 n’a pas été jouée), il ne fallut que peu de temps avant que la National Women’s Soccer League soit créée (2012, première saison en 2013). Le but est évidemment de créer une ligue stable, et pour ce faire, les échecs de la WUSA et de la WPS permettent de savoir les erreurs à éviter. La NWSL semble être sur le bon chemin. Découvrez ce qui a changé, et les raisons d’un succès croissant.

 

Pour l’amour du jeu

La majorité des joueuses évoluant en NWSL gagne à peine de quoi vivre. Avec un salaire minimum fixé à moins de 7000$ pour la saison (maximum de 37 800$ pour les quelques joueuses de niveau international), de nombreuses joueuses ont un job à côté, sont hébergées par des familles d’accueil ou ont la chance de voir leur famille les soutenir financièrement. Avec 14 000$ mensuels (selon le New York Times), Megan Rapinoe gagnait plus en un mois avec l’Olympique Lyonnais qu’un nombre important de joueuses en une saison de NWSL. Pour résumer la situation : la majorité des joueuses évoluant en NWSL le font car c’est leur passion, et non pas pour l’argent qu’elles pourraient gagner. En dehors des quelques joueuses émargeant dans les eaux du salaire maximum, seules les « allocated players » états-uniennes, au salaire payé par la fédération (et non pas les clubs), évalué à six chiffres*, vivent confortablement. Même les « allocated players » canadiennes et mexicaines gagnent peu, et leur nombre dans la ligue décroît année après année.

La conséquence de ces bas salaires, qui demandent à ce que les joueuses se trouvent un job ou une opportunité dans une ligue à l’étranger entre deux saisons, est le nombre élevé de joueuses prenant leur retraite, souvent jeunes, souvent importantes pour leur équipe. Elles ne peuvent pas toujours refuser les offres d’emploi intéressantes qui leur sont proposées. Une majorité pourtant continue l’aventure, parce que c’est leur passion donc, mais également parce qu’elles sont un des piliers d’une ligue stable sur le long terme, et une des principales raisons pour laquelle la ligue peut exister. Les salaires ont augmenté depuis les débuts de la ligue, et devraient continuer à évoluer progressivement. Les sacrifices financiers consentis par de très nombreuses joueuses sont une des clés d’une ligue qui veut s’inscrire dans la durée, après deux essais infructueux.

 

Ont-elles trouvé leur public ?

Lors de sa première saison, la NWSL était celle des trois ligues qui avaient un nombre de spectateurs moyen assistant aux matches le plus bas (8100 pour la WUSA, 4684 pour la WPS, 4271 pour la NWSL). Sans compter que la moyenne de Portland, supérieure à 13000, fausse quelque peu ce chiffre. Sans Portland, moins de 3000 personnes se déplaçaient au stade en 2013, idem en 2014.

Ces chiffres bas en comparaison de deux ligues qui ont mis la clé sous la porte pour raisons financières, et entre autres un nombre de spectateurs pas assez important pourrait être mauvais signe pour la NWSL. Mais contrairement aux deux autres ligues, le nombre de spectateurs n’a presque pas baissé lors de la deuxième année, grâce notamment à l’arrivée du Houston Dash comme 9e club de la ligue, et 2e derrière Portland au niveau des spectateurs. Alors que la WUSA et la WPS ont vu 1000 spectateurs de moins environ en moyenne aux matches, la NWSL n’en a perdu que 100.

Une des premières raisons de ces chiffres peu importants, c’est la capacité des stades, plus modeste : celui qui a la plus grande capacité en NWSL est logiquement celui de Portland, Providence Park (plus de 20000 places). Dans la WUSA, trois stades avaient des capacités supérieures à 30000 places. On peut noter également que le FC Kansas City, champion en titre, a changé de stade chaque année. Deuxième en terme de spectateurs lors de la première saison, dans un stade de plus de 6000 places, le voici désormais dans un stade de 1500 places (avec des gradins supplémentaires).

Actuellement, l’effet Coupe du Monde bat son plein, comme en Angleterre. Avec 21144 spectateurs lors de la rencontre face à Seattle, Portland a battu le record de la ligue, et toutes les équipes ont vu une grosse augmentation. La question maintenant, c’est comment retenir ces spectateurs, et capitaliser dessus pour la saison prochaine, alors que celle-ci approche rapidement de son terme, menant à plusieurs mois sans match officiel. Chicago et Boston ont déjà décidé de mettre les abonnements pour 2016 en vente ce mois-ci, pour surfer sur la vague…

 

Partenariats et exposition

Les équipes NWSL ont toutes plusieurs partenaires, souvent locaux, que ce soit comme sponsor, pour l’utilisation du stade, etc. Mais pour l’instant, les montants sont insuffisants pour que la ligue prenne son envol. C’est donc un des points critiques pour le futur de la NWSL, avec le nombre de spectateurs. Il faudra plus de partenaires, et des partenaires importants, pour que la ligue devienne autonome. Aujourd’hui, c’est la fédération états-unienne (USSF) qui paie tout ou presque, le salaire des membres de la direction, les arbitres, le marketing… ce qui pour l’instant permet, avec les bas salaires, de voir la ligue disputer une troisième saison.

La NWSL a réussi à obtenir des partenariats TV chaque saison (Fox Sports, ESPN), permettant une plus grande exposition. Mais ce qui différencie la NWSL de toutes les ligues de football féminin au monde et de ses prédécesseures, c’est la possibilité de voir tous les matches de la saison, que ce soit en streaming en direct (parfois une vraie aventure) ou plus tard sur la chaîne youtube de la ligue. Alors que les joueuses sont de plus en plus nombreuses à venir de l’étranger, cette offre, gratuite, même si le niveau de jeu n’est pas toujours au rendez-vous, a un énorme potentiel en terme d’exposition mondiale.

 

Vers une ligue all-stars ?

Pour l’instant, la NWSL est loin de posséder les grands noms de la WUSA ou de la WPS, où les équipes pouvaient être des dream teams où se côtoyaient (entre autres) Marta, Alex Morgan, Christine Sinclair, Caroline Seger… A l’heure actuelle, il est assez peu probable de voir les stars européennes rejoindre la NWSL. Les ligues européennes sont plutôt compétitives, la Ligue des Champions féminine est la compétition de clubs la plus prestigieuse, et surtout, les salaires dans les plus grands clubs intéressants. Les meilleurs joueuses européennes n’ont pour l’instant aucun intérêt ou presque à rejoindre la NWSL, que ce soit sportivement ou financièrement.

Pour l’instant donc, la NWSL doit se « contenter » de ses championnes du monde, mais dans un pays très porté sur le patriotisme, les noms d’Abby Wambach, Carli Lloyd, Megan Rapinoe, Hope Solo ou Alex Morgan font des ravages. A l’exception de plusieurs Australiennes, et de quelques joueuses d’avenir et/ou qui ont marqué la Coupe du Monde (la Colombienne Lady Andrade, la Brésilienne Andressa…), rares sont les joueuses étrangères, encore plus rares les « stars » non nord-américaines.

 
Le titre mondial obtenu cette année est une opportunité en or pour la NWSL. L’effet Coupe du Monde bat son plein actuellement, et il faudra que la ligue sache capitaliser au mieux sur cet effet pour se construire un avenir stable et éviter de connaître le sort de la WUSA et de la WPS. En cela, la présence des stars nord-américaines est primordiale, car c’est ce qui fait vendre, faute de pouvoir attirer des « stars » étrangères en nombre. Portland et Houston, supportés par des équipes de MLS (la ligue masculine) montrent la voie d’une stabilité future. Plusieurs franchises MLS ont annoncé être intéressées par la création d’une section féminine. Si plusieurs rejoignaient la ligue, son horizon s’éclaircirait de façon très nette.

 

*Selon le rapport financier de l’USSF concernant la période avril 2012-mars 2013, Alex Morgan était la joueuse US la mieux payée (282 564$), devant Becky Sauerbrunn (274 871$) et Christie Rampone (272 913$). Les autres joueuses étaient a priori juste derrière. Des chiffres qui englobent : l’activité à temps plein avec l’US Soccer, les bonus de la victoire olympique, les contrats pour la tournée de la victoire après les JO et les contrats NWSL.

 

Crédit photo : Mark Murray

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