Qui a dit que le football prenait ses vacances le 7 juillet, après la Coupe du Monde ? À Colomiers, l’ambiance était encore au ballon rond les 6 et 8 août, pour la Women’s French Cup. La troisième édition d’un tournoi amical réunissant quatre grands clubs européens : le PSG, le Montpellier Hérault SC, Chelsea FC et le Bayern de Munich. Belle affiche pour jouer les prolongations de la Coupe du Monde…
Derrière cette belle affiche se cache Camille Naude, fondatrice de la WFC. Travaillant dans une agence qui gère l’image et la carrière de sportifs à Toulouse, elle souhaite prolonger la Coupe du Monde dans la Ville Rose : « Je trouvais ça dommage qu’on ne reçoive jamais l’Equipe de France féminine à Toulouse. Et on avait perdu la belle époque du TFC. Je voulais ramener du bon niveau et du football féminin dans notre ville. »
Constatant qu’il y avait déjà le compte en tournois U19 et pour la D2, Camille voulait viser plus grand. Avec son association Sport Incub, elle créa donc un tournoi qui se veut une terre d’accueil et de préparation pour les plus grands clubs européens. Des matchs de pré-saison pour eux, tout en permettant au grand public d’assister à de belles rencontres !
Sport Incub : l’association autour du football et de l’égalité
Après une première année difficile en termes d’organisation, car toute l’équipe n’était pas forcément issue du milieu de l’événementiel sportif, la WFC commence à se faire un nom parmi les rendez-vous incontournables du football au féminin. Et cette troisième édition a été un succès. Au programme : le PSG, le Montpellier HSC, Chelsea FC et le Bayern Munich. Et parmi ces quatre pépites, seul Chelsea faisait figure de petit nouveau en arborant ses premiers pas sur le Stade Michel Bendichou, les autres étant déjà des habitués de la WFC. « Cela montre qu’on est enfin reconnus par les clubs et qu’on arrive à les faire revenir, c’est très important pour nous ! » confie l’organisatrice.
En parallèle, l’association Sport Incub a développé plusieurs actions autour du football et de l’égalité. Les membres interviennent dans les écoles et collèges des quartiers de Toulouse, pour sensibiliser les plus jeunes aux inégalités dans le sport, et pour leur montrer que le foot est un sport pour tous.
« On a suivi une classe de 6ème pendant 6 mois. On a fait avec eux des ateliers autour du genre et des métiers, en abordant notamment l’égalité dans le sport. On les a aussi emmenés voir un match de Coupe du Monde ! C’était génial, c’est du concret. On essaye de leur montrer qu’à leurs âges les différences physiques sont nulles, qu’ils peuvent pratiquer le sport ou le métier qu’ils veulent quelque soit leur sexe. J’espère qu’on contribue un peu à faire changer les mentalités, pour que plus tard ces enfants deviennent les acteurs de cette égalité. » développe l’ancienne footballeuse du TFC.
2019, l’année du déclic
Cette année, qui a vu Montpellier s’imposer face au PSG en finale, a également été l’édition avec le plus de spectateurs. Coïncidence après l’effervescence suscitée par la Coupe du Monde ? Sûrement pas, puisque le public de la WFC était le même que celui de la Coupe : « C’est un public très familial, avec beaucoup d’enfants, mais aussi des ados, des jeunes filles qui viennent voir entre copines ou avec leurs entraîneurs. La grande différence avec le public du football masculin c’est la parité, là on trouve à peu près 50% d’hommes et 50% de femmes ! » explique Camille Naude. Même si la WFC n’a pas attendu la Coupe du Monde pour faire carton plein et s’inscrire dans la pratique féminine et dans la ville de Toulouse, l’édition 2019 a clairement profité de l’effet Coupe du Monde.
Environ 2500 visiteurs par jour, soit 4000 sur l’ensemble du tournoi, avec un pic pour la finale. Une belle affluence donc, qui a pu profiter de toutes les animations prévues : de la musique, un stand de l’association organisatrice Sport Incub, des jeux pour les enfants, de quoi se restaurer et se rafraîchir, un stade décoré du logo de l’événement… Le tournoi ressemblait finalement à un festival où tous, adultes comme enfants, pouvaient venir s’amuser et partager autour du football, tout en ayant l’opportunité d’assister à du beau jeu ! Pour l’occasion d’ailleurs, le tournoi avait changé de nom. De « Toulouse International Ladies Cup » il est passé à la « Women’s French Cup » : « une dimension plus internationale, plu moderne, c’est ce qu’on voulait ! » confie Camille.
Pour cette année, l’équipe a également souhaité mettre les bouchées doubles sur la médiatisation, en y consacrant un tiers du budget total : mais cela valait le coup, puisque L’Equipe TV a couvert la compétition. Et en plus du public présent, 2 millions de personnes en cumulé ont suivi le tournoi depuis leur canapé, soit environ 500 000 par match. Enorme, quand on sait qu’un match de Ligue 1 en plein mois d’août réunit 200 à 300 000 téléspectateurs.
« Continuer à faire vivre le sport féminin »
Pour le tournoi, l’objectif à terme est de multiplier le nombre de clubs participants, et de s’internationaliser encore plus en invitant des clubs du monde entier. Même si pour l’instant, faute de temps et de budget, les organisateurs doivent se limiter à quatre équipes, ils ne se privent pas de rêver à plus pour les prochaines éditions.
Mais surtout, Camille et son équipe essayent de faire vivre le sport féminin : « Les joueuses du PSG sont allées s’entraîner au Stade Toulousain cette année, avec les rugby women. On veut vraiment créer une solidarité et un engouement autour du sport féminin ».
Engouement qui était à son apogée lors de la Coupe du Monde, mais ces initiatives suffiront-elles à faire qu’il ne retombe pas ? Pour Camille, la poursuite du développement de la pratique féminine au football dépend surtout de sa structuration et des instances dirigeantes :
« La fédération va avoir un rôle majeur dans les années à venir. Mais je pense que tout dépend aussi de la volonté des présidents de clubs. Ils doivent continuer et permettre à des sections féminines de se développer partout. On doit rabattre les cartes, aujourd’hui on est là, on a de plus en plus de filles qui font du foot, maintenant la question est comment on les intègre ? Est-ce qu’on crée que des clubs exclusivement féminins ? Ou est-ce qu’on développe des équipes féminines dans tous les clubs masculins ? Je ne sais pas, j’irai plus vers la deuxième option, car ce que je veux c’est du foot pour tous. »
Crédits photo de Une : Hugo Abadie