Viviane Asseyi, ange et démon

Travailleuse, bonne vivante et taquine, Viviane Asseyi fait l’unanimité là où elle passe, du côté du staff ou des joueuses, à qui elle fait parfois vivre un (sympathique) calvaire. C’est avec cette insouciance que la Marseillaise de cœur a traversé sa vie dans le foot. Jusqu’à l’équipe de France, et Clairefontaine, où elle apporte là encore sourires et grimaces.

 

 

12 Juillet 98. Quand ils entrent dans l’histoire en battant le Brésil (3-0) à plate couture dans un stade de France survolté, les joueurs d’Aimé Jacquet font des millions d’heureux dans toute la France. Parmis eux, il y a cette gamine de Quevilly, une Normande pur jus, qui se découvre alors une passion pour ce ballon que le numéro 10 tricolore Zinédine Zidane semble ensorceler. Cette fille, c’est Viviane Asseyi qui, à 5 ans alors, ne devait pas un jour s’imaginer porter les mêmes couleurs, et devoir répondre aux questions des journalistes.

 

De Quevilly à Montpellier 

La native de Mont-Saint-Agnan est aujourd’hui une habituée des listes de Corinne Diacre, puisqu’elle n’a jamais manqué un rassemblement depuis l’arrivée de l’ex Sojaldicienne à la tête des Bleues. « Je n’ai pas encore de statut, ça se mérite et il faut travailler beaucoup pour en avoir un. C’est bien au niveau personnel d’être appelée une troisième fois mais ce n’est pas une fin en soi ! Je sais qu’il faut que je travaille continuellement pour être en équipe de France les prochaines fois », explique celle qui s’est fait une spécialité de lutter contre vents et marée. Contre sa mère, déjà, pour qui, à l’époque « le foot est un sport de garçon ».

 

Presque 20 ans plus tard, celle-ci rembobine : « Au départ, elle m’a ramené un ballon en plastique. Elle pensait que je ne verrai rien mais moi je lui ai dit « non, je veux un ballon comme Zidane ! » (sourire). Et c’était parti ». Les premiers pas en club sur les rectangles verts se sont fait, comme pour beaucoup de ses partenaires, parmi les garçons, à l’US Quevillaise : « Ça reste l’un de mes meilleurs souvenirs. En plus comme on n’était pas beaucoup de filles à jouer au foot, on était leurs préférées ! ». Puis, à ses 14 ans, arrive le premier défi, à Rouen, chez les filles, où elle joue le week-end après avoir passé la semaine à Clairefontaine. Un quotidien qui l’éloigne un peu de sa famille pendant plus d’un an, avant le grand écart.

 

« Elle a des qualités qui tiennent de l’inné »


Car en 2010, Montpellier lui propose une place dans l’effectif professionnel : « A cette époque ils faisaient la Ligue des champions, donc je ne pouvais pas refuser, c’était trop beau (sourire) ! », s’amuse aujourd’hui cette fan de Zidane, qui cultive une particularité en commun avec son idole : son sens de la surprise. « Ses forces, c’est sa vitesse et surtout son imprévisibilité. Elle est surprenante, ne va jamais faire deux fois la même chose. C’est une joueuse d’instinct », expose Jean-Louis Saez qui arrive trois ans après « Vivi », à la tête de l’équipe première. « J’avais souhaité la conserver parce qu’elle a des qualités qui tiennent de l’inné, raconte-t-il aujourd’hui. L’embêtant pour des joueuses comme ça c’est qu’il faut leur laisser leur instinct, en travaillant la constance. Mais c’est une bonne vivante ! Elle est très agréable, comme fille », finit par lâcher le coach Montpelliérain, alors qu’à l’époque, Asseyi obtient ses premières sélections en équipe de France.

 

Une impression qui confirme le sentiment général autour d’une joueuse attachante : « Déjà c’est un être humain agréable à connaître, pose son entraîneur actuel, Christophe Parra. C’est une personne bienveillante, positive, qui essaie toujours de transmettre une image et des émotions qui vont ensoleiller les personnes qu’elle côtoie. C’est aussi cette dynamique positive qu’elle arrive à transférer à un groupe ». C’est en partie pour ça que l’OM est venu la chercher, en 2015, lors de sa montée en D1. Une occasion alors de faire coup double. En plus de passer un palier, Asseyi peut aussi rejoindre son club de cœur : « Depuis que je suis petite, je voulais porter ce maillot. J’aimais trop le Vélodrome quand je regardais les matches à la télé, et j’aimais bien Drogba aussi à l’époque », explique la joueuse supersonique, qui adore regarder les matches de Cristiano Ronaldo… et de Neymar.

 

« A chaque fois, je lui cachais ses affaires dans le vestiaire ! »


« Ça lui permettait de gagner en maturité. Avoir des responsabilités, dans un club comme Marseille qui venait de D2 mais qui avait des attentes, ça lui a fait du bien. Comme je lui avais dit, c’était bien de pouvoir bonifier tout ce qu’elle avait appris chez nous dans un autre contexte, où on allait moins la voir comme la petite dernière qui arrive, mais plus avec un statut de leader », décrypte Saez. « Elle va vite, elle saute haut, elle frappe fort… donc elle a beaucoup de capacités sur le plan athlétique. C’est quelqu’un qui, quoiqu’on puisse penser, est capable de courir longtemps. Elle peut défendre pendant de longues minutes, elle a d’ailleurs progressé à ce niveau », selon Parra.

 

L’occasion aussi d’exporter ses talents de chambreuse dans un autre vestiaire. En quelques minutes d’entretien, on n’a pas attendu pour le voir de nos yeux lors d’un concours improvisé de grimace- et de déconcentration –avec la non moins comique Griedge M’Bock. Tout le monde y passe dans le vestiaire Marseillais, en particulier les étrangères, à qui elle adore faire des blagues, ainsi que Kelly Gadéa, qu’elle connaissait déjà de Montpellier : « A chaque fois, je lui cachais ses affaires dans le vestiaire ! Mais maintenant ça marche plus parce qu’elle sait que c’est moi ! », rigole-t-elle.

De quoi décompresser au cours d’un exercice plus que compliqué pour la Normande, arrivée à la 4e place avec le club olympien l’an passé. Dernières de D1 cette saison, les Sudistes viennent notamment d’encaisser un lourd 5-2 à domicile face au PSG. Après avoir mené 2-0 grâce à un but et une passe décisive de… Viviane Asseyi.

 

Auteure de ses 4 premiers buts en équipe de France

« Le truc c’est que c’est compliqué sur le terrain, mais que en dehors tout va bien. C’est encore plus énervant, dixit cette fan de foot, amatrice de cinéma, et de shopping. Il y a une bonne ambiance, mais une fois en compétition, on n’arrive pas à faire le maximum ». Un comble, alors qu’elle vient d’inscrire en quelques mois ses quatre premiers buts en équipe de France, célébrant à chaque fois d’une danse qui, même derrière le téléviseur, vous donne envie d’apprécier Viviane Asseyi.

Etudiante en marketing, celle qui ne manque jamais de rappeler l’importance du « travail » pour retrouver le droit chemin sur les rectangles verts, a d’ailleurs stoppé ses études cette saison, afin de se concentrer sur le foot : « Moi la première, j’ai raté beaucoup d’occasions franches et c’est embêtant, reconnait-elle. Mais je garde la tête haute. De l’abattement ? Jamais ! ». Ne vous étonnez donc pas si, ce vendredi face à l’Allemagne ou lundi à Bordeaux contre la Suède, vous voyez ce petit diable marquer le match de son empreinte : « Il faut toujours être à fond, quelle que soit la rencontre. Si la sélectionneuse me fait jouer, il faut que je montre qu’elle a raison ». Corinne Diacre ne demande pas mieux.

 

 

Tous propos recueillis par Vincent Roussel

Crédtis Photos : Vincent Roussel pour Foot d’Elles

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