Un magazine pour parler de sportives, pas de femmes et de sport

A 28 ans, Aurélie Bresson a fondé le magazine Les Sportives pour mettre en lumière les athlètes de haut niveau, les clubs féminins, les bénévoles qui s’investissent pour le sport… En un mot, les sportives au sens large. Un coup de projecteur qui porte ses fruits aujourd’hui dans la presse et qui accompagne la médiatisation du sport féminin. Chapeau !

Une histoire de convictions. Le magazine Les Sportives est vraiment lié à sa créatrice Aurélie Bresson. « Mes meilleures amies sont des sportives, et j’ai moi même fait de la gymnastique très longtemps. J’ai constaté chaque jour les choix que l’on doit faire quand on est une femme entre sport et études, sport et carrière : c’est plus compliqué pour les femmes de vivre du sport donc on doit voir plus loin », commence la jeune entrepreneuse. Fan de médias – elle consomme au moins un journal chaque matin-, elle regrette de ne pas lire de sujets sur ces sportives et leurs choix dans la presse sportive française. Elle regrette, aussi, que les femmes soient cantonnées à un rayon dans la presse féminine, et trop rarement en bonne place dans la presse sportive.

Pourquoi personne ne s’intéresse aux choix qu’ont à faire les sportives ?

Celle qui a toujours été très investie dans des clubs sportifs, notamment l’Entente Sportive Bisontine Féminine Handball (ESBF de Besançon), ou des associations – elle chantait dans la chorale humanitaire les enfants de l’espoir-, décide de créer elle même le journal qui parlerait de ces femmes-là. Après un IUT Information et communication à Besançon, la native de Vesoul s’inscrit en licence de culture médiatique puis rejoint Metz et le Metz handball pour son stage de Master 1. Enfin, elle s’installe à Paris et obtient le diplôme de l’Institut supérieur de communication et publicité.

« Pendant toutes ces années, plein de choses me ramenaient à cette idée de magazine. Par exemple, quand Allison Pineau à rejoint le Metz handball, presque personne n’en a parlé ! » La plupart de ses copines arrêtent le sport pour des questions de planning. Mais là aussi, personne n’en parle. Et Aurélie Bresson a toujours la même question en tête : pourquoi personne ne s’intéresse aux choix de ces femmes, de ces sportives ?  « Le jour où j’ai eu le titre du magazine, j’ai su que j’irai au bout », raconte elle. Entre 2011 et 2016, l’idée suit son chemin et Aurélie Bresson prépare son business plan.

Elle monte le magazine sur ses propres deniers

Elle n’a aucun contact dans la presse ou l’édition, pas de financeur, mais son banquier lui accorde un prêt. Elle monte le premier numéro sur ses propres deniers. La cycliste rémoise Pauline Ferrand-Prévot fait la Une du numéro 1, qui sort le 8 avril 2016. Il est tiré à 20 000 exemplaires.

Deux ans plus tard, le trimestriel a trouvé son lectorat. « Nous avons 1500 abonnés, dont la moitié d’hommes, et le tirage est resté à 20 000, excepté pour le numéro anniversaire des deux ans où nous avons conclu un partenariat avec l’Equipe et tiré à 60 000 exemplaires ! » se réjouit la fondatrice.

Les sujets ? Des focus sur les sportives de mère en fille, sur les filles issues de l’immigration qui utilisent le sport pour écrire leur histoire, sur les femmes de la montagne… Et des portraits, de sportives connues, comme Laura Flessel récemment, ou Marie Martinod (ski acrobatique), mais aussi de Cecile Hernandez (snowboard handisport) ou Gaëlle Mignot (rugby).

Responsable des relations publiques et de la presse à l’UNSS en parallèle de la gestion du magazine, Aurélie Bresson ne compte pas ses heures (et regrette que les journées ne fassent que 24h !). Elle gère l’administratif, l’animation des réseaux sociaux, la ligne éditoriale, et confie la rédaction à des journalistes professionnels. Une équipe d’une dizaine de collaborateurs réguliers tous férus de sport, de sport au féminin et de contact humain.

Si Aurélie Bresson aimerait passer en bimestriel et multiplier les angles, elle reconnaît que la médiatisation des sports féminins et des sportives évoluent « dans le bon sens ». « Quand je suis arrivée, tous les médias m’ont souhaité la bienvenue, je pense que je ne représente pour eux aucune concurrence, j’ai apporté ma petite contribution. Les Sportives est sur une ligne complémentaire à ce qui existait ». Le magazine s’est d’ailleurs rapproché de titres existants comme So Foot, L’Equipe, ou Causette pour des opérations.

De la voisine qui fait du jogging à Serena Williams

« Aujourd’hui, on appelle une femme « une sportive« , et pas « une femme qui fait du sport«  ! » se réjouit la communicante. « Quand on a demandé à nos lecteurs ce qu’était pour eux une sportive, c’était autant la voisine qui fait du jogging que Murielle Hurtis ou Serena Williams, leur mère qui arbitre dans un club ou la cousine qui fait du trampoline », énumère-t-elle. Son magazine s’intéresse donc à toutes ces femmes. Et à leur vie autour du sport.

« J’ai encore plein de projets pour augmenter la communauté des Sportives, j’aimerais qu’on se développe plus en digital rapidement, mais en restant authentique, proche des gens », décrit la fondatrice qui participe aussi de nombreuses conférences ou colloques sur la médiatisation du sport féminin.

Côté foot, après la Une sur Marinette Pichon dans le numéro 8, les amatrices pourront se jeter sur les prochains numéros. « Le foot féminin était l’un des sports dont on parlait déjà (un peu) dans les médias, donc ce n’était pas ma priorité, mais avec la Coupe du monde qui arrive, nous devons relever le défi : ce serait super que les Bleues soient championnes, juste après les garçons, ce serait un beau symbole ! », encourage Aurélie Bresson. « Notre but est d’en parler en amont, pour voir l’état d’esprit dans lequel les filles vont aborder la compétition, car pour les comptes-rendus de matchs, d’autres font ça très bien ».

 

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