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Que le foot est beau, quand il sert de lucarne sur le monde !
Kenza, Imène, Hind, Nisswate, Fleur et les autres n’ont pas attendu le ballon rond pour exister et, surtout, ne l’ont pas choisi pour revendiquer !
Étonnées quand on leur demande si le foot est en mesure de favoriser l’émancipation des femmes, nos ados sont souvent à mille lieues d’imaginer les enjeux de la féminisation du sport : « C’est le travail qui rend les femmes indépendantes, je crois pas que les loisirs puissent aider » déclare Inès, dubitative.
Au fil de l’entretien, Nisswate et Kenza concèdent, sans grande conviction, que pratiquer « le rugby ou la boxe » ou travailler « à l’armée » donnent une autre image des femmes.
Et le football féminin ? Du haut de leur 15 ans (en moyenne), nos joueuses sont catégoriques : « il n’y a pas des sports pour les filles et d’autres pour les garçons. Le sport est à tout le monde » comme le rappelle calmement Clémentine. Un constat qui va tellement de soi pour nos footballeuses, que la singularité de leur situation leur échappe. Qu’à cela ne tienne, on leur reposera la question dans 10 ans !
Nées dans les années 2000, nos joueuses ont grandi dans des quartiers populaires de l’Ile-de-France où elles n’ont pu échapper à l’omniprésence du ballon rond. Toutes petites déjà, elles jouaient dans leur quartier avec leurs frères, les copains et les copines. Habituées aux jeux en plein air et à l’esprit de compétition, c’est tout naturellement que nos joueuses pratiquent différents sports (judo, natation, boxe, handball et basket-ball) avant de sauter le pas du foot en club. Ces parcours, similaires à ceux des garçons de leur entourage, ont conduit la majorité de nos joueuses à développer durant leur enfance des attributs de « garçon manqué » qu’elles sont nombreuses à revendiquer : « Quand j’étais en primaire, je piquais souvent les habits de mon frère pour aller jouer dehors ou faire du sport et des fois on me prenait pour un garçon, j’étais fière » raconte Chloé. Le combo short/tee-shirt semble en effet avoir constitué, pour les petites filles qu’elles étaient, un précieux sésame pour approcher le monde très prisé des garçons. Pour autant, elles sont nombreuses à abandonner ces codes au moment de l’adolescence. Et finalement, la pratique du foot ne semble pas perturber une féminité plus conventionnelle, assumée pour les plus âgées d’entre elles. Au contraire, les jeunes femmes qu’elles sont devenues n’hésitent pas à user voire abuser des apparats traditionnellement dévolus au féminin et certaines arborent rouge à lèvres et brushing sur la pelouse. La frontière entre « garçons manqués » et « girly » n’est finalement pas si éloignée pour nos joueuses qui prouvent que le trouble dans le genre n’est pas forcément au bout du crampon.
Explications.
Licenciée au club de Sartrouville, Inès, raconte : « On jouait à Paris, dans le 15e arrondissement, et on a été dégagées en plein match par une équipe de garçons. Ils se sont pointés, ils ont enlevé les cages parce qu’ils avaient besoin du terrain. Quand on leur a demandé ce qu’ils faisaient, ils nous ont dit que leur coach leur avait dit de le faire ». Dans la même veine, les jumelles du même club, Amandine et Juliette, se souviennent d’un événement qui les a marquées : « Il y a quelques années, on était venues s’entraîner au stade, à un moment où les garçons n’étaient pas là. Il n’y avait pas de lumière, pas d’eau, tout était coupé ». Et dans le quartier, sans surprise, même combat. À Villiers, Nisswate explique que lorsqu’elle et ses copines jouent au foot à la cité, les garçons viennent souvent leur piquer le ballon et les font dégager du terrain. « On se venge après bien sûr… en les empêchant de jouer ! », ajoute la jeune fille. Maigre consolation pour ces joueuses qui ne peuvent se passer des rappels à l’ordre.
Prise de son de quelques jeunes filles durant la pause déjeuner lors d’un tournoi de football
Cette anecdote, racontée par Sihame, milieu droit à Domont, incarne parfaitement l’ambivalence des relations entretenues entre joueurs et joueuses au sein d’une équipe mixte. À la fois « chouchou » et souffre-douleur, les filles qui jouent parmi les garçons sont l’objet de toutes les attentions. De trop d’attention, selon Amandine et Juliette qui déclarent : « on préfère mille fois jouer avec les filles parce que même si le jeu est meilleur avec les garçons, soit ils nous rabaissent, soit ils ont peur de nous faire mal et du coup, nous évitent ». Entre mauvais coup et surprotection, le cœur des footballeuses balance sévère. Et pourtant, Sihame a été très peinée de devoir quitter les copains du club de sa ville (Cormeille, 95), pour rejoindre l’équipe féminine du RFC d’Argenteuil. Mais elle n’a pas eu le choix, la FFF autorisant la mixité jusqu’à 15 ans seulement. À Sartrouville, Kenza aussi aimait les « tacles vénères » des garçons, qui lui rappelaient les matches de la cité avec son grand frère et ses copains. D’aucunes diront que les filles ne sont pas douces et les entorses, hématomes et autres contusions sont monnaie courante. Mais la violence des garçons, seule violence légitime, a un autre goût, celui du dépassement de soi et de la consécration. Imène, qui s’est déboîté l’épaule lors d’un match à Cergy, a tout simplement refusé de s’arrêter pour ne pas «perdre la face». Pas de doute, les filles encaissent…
Difficile pour nos adolescentes de se constituer des modèles féminins dans un espace largement dominé par les hommes. Et pourtant, la proportion de footballeuses licenciées a doublé depuis 2010 et elles pourraient prochainement atteindre la barre des 100 000*. Si les femmes qui jouent au foot sont encore parfois considérées comme des OVNIS, on peut craindre à terme une petite invasion ! Les coupables ?
Le plan de féminisation lancé par la FFF, mais aussi (et peut-être surtout ?) l’augmentation progressive de la visibilité du football féminin. Depuis 2011, la situation s’est en effet améliorée, grâce notamment au choix de la Fédération de vendre dans un même lot les droits de retransmission du foot féminin et du foot masculin. La même année, la chaine D8 a ainsi décroché le record annuel d’audience de la TNT, avec plus de 2,3 millions de téléspectateurs le soir de la demi-finale de la Coupe du Monde opposant la France aux États-Unis. Cette année-là, nos joueuses ont une dizaine d’années et certaines ont assisté aux prouesses des Bleues jusqu’à leur élimination.
Si elles ne suivent pas avec la même assiduité les compétitions féminines et masculines, l’existence des footballeuses professionnelles leur est familière. Et ça change tout !
« Ma mère et ma tante ne voulaient pas que je fasse du foot, elles disaient que c’était pas bien pour une fille. Heureusement, mon père suit les féminines de l’Équipe de France et m’a soutenue », raconte Imène. Même son de cloche chez Wallen : « Mon oncle m’a toujours poussée à faire du foot et m’a emmenée voir mon 1er match de filles ».
Le phénomène s’est encore amplifié grâce à la Coupe du Monde de 2015 qui, en plus d’offrir des records d’audience à W9, a captivé nos apprenties-footballeuses et leurs familles : « On a regardé les matches avec mon père et mon frère, ma mère en avait ras-le-bol ! », déclare Fleur, de Domont. En 2019, des joueuses et des support-rices-ers venus du monde entier investiront les stades français pour assister aux matches de la Coupe du Monde avec des Bleues troisièmes au classement de la FIFA…
Accrochez-vous Madame, car ça risque de ne pas s’arranger ! *Au moment de la rédaction, le nombre de licenciées était inférieur à 100 000, il est aujourd’hui supérieur.
Décomplexé
«A l’école, y a du racisme dans les paroles tout le temps : négro, l’arabe, blanco etc. C’est pas vraiment méchant, mais c’est quand même du racisme, non ?» Chloé.
Entre-soi
«Personnellement, j’ai jamais souffert du racisme, mais on voit bien qu’en général les gens ne se mélangent pas, en classe en tout cas c’est comme ça. Y a pas longtemps, on m’a même reproché de m’être francisée.» Inès.
Cancres
«À Sartrouville, y a du racisme contre ceux qui habitent dans les cités. Les gens disent qu’ils sont mal éduqués ou qu’ils travaillent pas bien à l’école.» Amandine.
Bouc-émissaire
«Une fois j’attendais le RER et y avait des gens qui parlaient d’une femme voilée en la montrant du doigt : ils disaient que c’était à cause des gens comme ça qu’il y a des attentats en France» Laeticia.
Melting-Pot
«À Villiers, on trouve beaucoup de personnes différentes, avec des origines différentes et des religions différentes. Mais les personnes qui habitent pas ici disent qu’il y a trop de diversité, que c’est un problème» Assia.
KFC
«Le racisme, ça veut dire avoir des préjugés, comme quand on dit que les tous les arabes sont des terroristes et que tous les noirs aiment le poulet» Kenza.
Garder la banane
«Dans le foot aussi y a des problèmes des fois. Comme l’histoire du joueur du Barça à qui on avait jeté une banane parce qu’il est noir. Il a eu une trop bonne réaction de la manger, c’est un bon exemple pour les jeunes» Fiona.
Si l’on questionne rarement l’existence de différences physiques entre les footballeurs et leurs homologues féminins, on exalte souvent les valeurs et l’état d’esprit des joueuses, à qui l’on attribue mille vertus.
Convivialité, respect et authenticité caractériseraient ainsi un football féminin plus proche de l’amateurisme que du foot-business masculin. Pour comprendre d’où viennent ces soi-disant spécificités, un bref coup d’œil à l’histoire s’impose. A partir de 1919, le football féminin évolue, en parallèle des Fédérations masculines, sous l’égide de la Fédération des Sociétés féminines Sportives de France. En parallèle, certes, mais surtout en miroir ! Le foot féminin se dote à cette époque (et pour longtemps) de règles supposément adaptées à la « constitution des femmes ». Dans son ouvrage Histoire du football féminin au XXe siècle, Laurence Prudhomme-Poncet nous apprend par exemple que « tout ce qui peut rappeler le jeu masculin et ses gestes un peu rudes » est supprimé, tout comme le contact entre les joueuses. En dépit des moult évolutions qu’a connu le foot féminin au cours du XXe siècle, on observe encore aujourd’hui les reliques de cet héritage dans le jeu des filles. De là à conclure qu’elles sont par nature moins violentes que les garçons, il ne faut pas exagérer. Foot d’Elles a quand même voulu demander aux joueuses ce qu’elles en pensaient : « C’est vrai que les filles sont en général moins violentes que les garçons mais la bonne mentalité, je sais pas, on joue pour gagner quand même ! » déclare Fleur. Pour Assia «les filles sont plus solidaires» alors que Sihame, qui a joué deux ans avec les garçons avant d’intégrer l’équipe féminine du RFC d’Argenteuil, estime qu’au contraire « les filles sont plus mauvaises perdantes que les garçons et s’énervent beaucoup plus vite ». Plus ci, moins ça, pas assez comme ça… le véritable problème ne serait-il pas que les footballeuses sont systématiquement évaluées par rapport aux footballeurs ? Et pour une référence, franchement, on a fait mieux : prostitution sur mineur, chantages, déclarations scabreuses et affaires de gros sous… Pas étonnant qu’en comparaison les filles passent pour des enfants de chœur. Et si on oubliait les garçons cinq minutes, qu’est-ce qu’on penserait ?
Toutes les affirmations sont authentiques et nous montrent l’étendue du chemin qu’il reste à parcourir pour atteindre l’égalité hommes/femmes dans le sport.
a) Christine Boutin
b) Jean-Jacques Rousseau
c) Nadine de Rotschild
2. Que perçoit la footballeuse de D1 la mieux payée ?
a) une paire de crampons à paillettes
b) des bons d’achats chez Yves Rocher
c) 12 000 euros par mois
3. De qui Pierre Menès parle t-il quand il évoque des « grosses dondons qui étaient trop moches pour rentrer en boîte le samedi soir » ?
a) des parlementaires françaises
b) des footballeuses des années 70
c) des présentatrices de Canal +
4. Quel est le pourcentage de femmes au sein des fédérations sportives françaises ?
a) 37%
b) 47%
c) Données non disponibles
5. Quelle part de son budget le PSG consacre t-il à sa section féminine ?
a) 1%
b) 30%
c) Quand on aime, on ne compte pas
6. Dans les années 20, on redoutait que le foot rende les femmes :
a) communistes
b) stériles
c) poilues
7. En quelle année le foot féminin a-t-il été intégré à la FFF ?
a) 1789
b) 2001
c) 1970
8. A quoi servent les « test de féminité » pratiqués sur certaines sportives de haut niveau ?
a) vérifier qu’elles sont bien des femmes
b) vérifier qu’elles courent moins vite que les hommes (même un jour de soldes)
c) vérifier qu’elles ont une âme
Les bonnes réponses : 1)b ; 2)c ; 3)b ; 4)a ; 5)a ; 6)b ; 7)c ; 8)a
Foot d’Elles a cherché à savoir si l’attaquant suédois, qui s’illustre autant par son sens de la punchline que par ses fulgurances sur le terrain, faisait rêver les jeunes footballeuses.
Fleur, qui joue à Domont, est une inconditionnelle d’Ibra : « Je l’admire autant pour ses capacités physiques que pour son mental. Il a zéro pitié et il en faut toujours un dans une équipe. »
Un avis qui ne fait toutefois pas l’unanimité. Les jeunes joueuses sont en effet très critiques vis-à-vis de la super star du PSG, et lui reprochent notamment sa saillie anti-France lâchée à Bordeaux, au printemps dernier : « (…) dans ce pays de merde. Ce pays ne mérite pas le PSG ».
Si elles sont nombreuses à déplorer sa « mauvaise mentalité » ou son côté « trop rageux », difficile de clamer haut et fort son désamour pour le prodige du club parisien. C., qui préfère garder l’anonymat par peur de représailles (zlatanesques ?), me confie, en chuchotant, qu’elle préfère l’O.L au PSG et déteste Ibrahimovic et son obsession du « fric et du buzz ».
Mais chut …