Soyaux, 50 ans et toujours infatigable

Soyaux est une petite ville en Charente que beaucoup n’arrivent probablement pas à situer sur la carte de France. En revanche, pour les amateurs de foot, Soyaux fait partie des clubs incontournables de l’hexagone. Le club historique fête son cinquantenaire cette année… Mais comment parvient-il à s’en sortir parmi l’élite ? Zoom.

 

 

Avec un peu moins de 10 000 habitants, Soyaux est la troisième ville du département de la Charente et prolonge l’agglomération angoumoisine par l’Est. La ville fait partie du « Grand Angoulême », où elle occupe une position de choix dans cet ensemble d’environ 106 200 habitants, ce qui lui permet de disposer d’atouts majeurs pour accompagner son essor.

 

Une longue histoire, mais pas un long fleuve tranquille
En 1968 l’Association Sportive de Soyaux créait une section féminine pour répondre à la demande de certaines femmes déjà désireuses de taper le ballon, mais aussi pour faire participer le club à différentes manifestations dans lesquelles évoluaient des équipes féminines (tournois, fêtes de village…). Au fil des années, et grâce à Claude Fort notamment, la pratique féminine se développe et trouve sa place dans le club sojaldicien. Joueur de l’AS Soyaux, Claude Fort est le premier à avoir entrainé l’équipe féminine, et probablement le premier à avoir compris que les femmes pouvaient elles aussi rendre ce sport passionnant, et porter haut les couleurs du club charentais. Sur le site du club, Claude Fort, aujourd’hui Vice-Président, se souvient : « J’ai rapidement trouvé des filles très motivées. À l’origine le côté minoritaire de cette pratique m’avait semblé un défi passionnant à relever. Il l’a été ! ».

Dans le milieu des années 70, le club continue son développement et met en place sa première école de football féminin. Un grand pas pour l’AS Soyaux qui laisse penser que le club souhaite inscrire sa section féminine dans la durée… Finalement, après avoir brillé dans les différents championnats et remporté plusieurs titres, la section féminine de l’AS Soyaux est supprimée en 1982. Un coup de balai sur la section, principalement parce que les équipes féminines obtiennent de meilleurs résultats que les masculines, et que les hommes du club ne supportent pas d’être mis au second plan. Heureusement, certaines personnes sont déjà convaincues par ces femmes footballeuses, et ensemble, elles parviennent à tenir leur club à bout de bras pour devenir un club indépendant : l’ASJ Soyaux !

Aujourd’hui, fort de son expérience, le club charentais compte cent cinquante licenciées, deux équipes séniors, quatre équipes de jeunes et une école de football. Si l’ASJ Soyaux n’a pour le moment pas de joueuse appelée en équipe de France A, le club en a eu plusieurs par le passé, et en compte tout de même de nombreuses en équipe de France jeunes et en équipe de France B.

 

Les bénéfices de la région et de la convivialité
Pour le club de Soyaux, 2018 est l’année de son cinquantenaire, symbole d’une grande réussite au niveau sportif mais aussi au niveau associatif. Marilyn Fort, Présidente de l’ASJ et femme de Claude Fort, se dit « très fière d’avoir réussi à ce que qu’un club exclusivement féminin vive aussi longtemps », et en effet, au jour d’aujourd’hui, il faut bien admettre que cela sonne comme un exploit au sein d’une D1 féminine qui tend à se « professionnaliser » et dans laquelle les écarts se creusent entre les trois cadors (Lyon, Paris, Montpellier) et le reste. Mais alors comment un club comme l’ASJ Soyaux parvient-il à tirer son épingle du jeu et à se maintenir dans l’élite du football français ?

Par le passé, Soyaux a en quelque sorte bénéficié d’être un peu « isolé » puisque le club était le seul de la région à avoir une équipe qui évoluait en D1. C’est assez logiquement que les bonnes joueuses et les jeunes joueuses se alors tournaient vers l’ASJ Soyaux. Évidemment, la proximité est une chose, mais si les joueuses restent et continuent de rejoindre le club sojaldicien aujourd’hui c’est sans doute aussi pour son savoir-faire et son côté convivial, comme aime le souligner Marilyn Fort : « Nous avons connu les différentes époques du football féminin, du démarrage à aujourd’hui, avec tout ce que cela implique, et une sorte de « professionnalisation » qui s’installe au fur et à mesure. Si le club perdure, c’est aussi parce que nous savons accueillir et faire en sorte que les joueuses se sentent bien ici. Je pense aussi que les Présidents ont contribué au fil des années, à faire du club ce qu’il est aujourd’hui, de par leur persévérance, leur bon sens et leur envie d’aller plus loin dans les projets. C’est tout ça qui nous permet d’être encore à ce niveau aujourd’hui. »

 

Des soutiens importants pour durer
Pour comprendre un peu mieux comment le club charentais continue de vivre et de trouver les soutiens et les financements nécessaires, il suffit de visiter le site de l’ASJ et d’y découvrir le nombre de partenaires qui l’accompagnent d’une manière ou d’une autre. Pas de doute, le club sojaldicien fait l’unanimité pour son capital sympathie et l’image positive et bénéfique qu’il renvoie du sport charentais, et ce n’est pas Marie-Noëlle Debily, adjointe au Maire de Soyaux, déléguée à la vie associative, à la culture et aux sports, qui dira le contraire : « Malgré le haut niveau, le club est resté très familial et proche de toutes et tous. Cela donne une image positive de notre ville puisque le club joue au plus haut niveau depuis longtemps et que ses joueuses véhiculent de belles valeurs et beaucoup de sympathie. À Soyaux, l’ASJ est le seul club féminin à un tel niveau alors cela valorise la ville, et permet de la faire connaître à travers la France ».

Mais si la Mairie de Soyaux est fière de ce club et qu’elle a toujours voulu l’accompagner dans son développement, il faut aussi comprendre que Soyaux n’est pas une grande ville et que le budget de la municipalité n’est pas énorme non plus. Pas de nouveau stade, de nouveaux vestiaires ou de nouvelle pelouse prévus du côté de Soyaux, mais des réflexions et d’éventuels accords avec le voisin d’Angoulême, afin que l’ASJ puisse continuer dans de bonnes conditions. La Ville de Soyaux fait avec ses moyens, mais montre son soutien avec « un partenariat sponsoring entre la ville et l’ASJ Soyaux » dans lequel la municipalité sponsorise à hauteur de quatre matches sur la saison. « C’est une aide supplémentaire qui n’existait pas il y a quelques temps. Nous faisons avec notre budget et nos moyens qui ne sont pas énormes, mais cela nous tient à coeur », souligne la représentante du Maire, Marie-Noëlle Debily.

 

Et l’avenir ?
Lorsque l’on parle avenir pour l’ASJ Soyaux, il est quasiment inévitable de ne pas penser à un rapprochement avec une structure « masculine », comme l’ont fait les autres clubs de l’élite au fil des saisons. Il y a une dizaine d’années, la possibilité d’un parrainage avec les Girondins de Bordeaux avait été évoquée, mais comme les deux clubs n’étaient pas dans la même région, cela avait rendu les choses compliquées et le projet été tombé à l’eau. À en croire sa Présidente, une éventuelle fusion avec un club de l’agglomération du « Grand Angoulême », tel que l’ACFC (Angoulême Charente Football Club) par exemple, ne serait pas impossible pour l’ASJ Soyaux : « Nous ne sommes pas contre unir nos forces avec un club masculin, mais pour le moment, le projet n’est pas vraiment d’actualité. Je pense qu’il faudrait que les deux clubs soient un peu moins fragiles financièrement, de manière à pouvoir s’associer et travailler ensemble.»

Pour la Ville de Soyaux, qui pourrait perdre un peu de notoriété si le club ne portait peut-être plus son nom, cela ne semble pourtant pas être un problème, et l’adjointe au Maire ne voit pas cette hypothèse comme quelque chose de négatif : « Je pense que le rôle des élus est aussi d’écouter les clubs et les éventuelles problématiques qu’ils peuvent rencontrer pour se développer et préparer l’avenir. Sur ce sujet, l’ASJ Soyaux est au coeur du problème et s’il prend la décision de s’associer à un club masculin, je pense que nous le suivrons. Ce sont les membres du club qui se battent pour rester en D1, ce sont eux qui vivent les problématiques quotidiennement, mais nous travaillerons toujours ensemble à ce niveau-là ».

Quoi qu’il arrive et qu’importe le chemin que prendra l’ASJ Soyaux après son cinquantième anniversaire, il semble bien que le club charentais est trouvé des soutiens sans faille, pour continuer à faire les beaux jours de sa région et du football français…

 

 

 

Propos recueillis par Sandrine Dusang

 

 

Crédit photos : ASJ Soyaux

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