Mélissa Plaza : « A l’école, dans le sport comme en entreprise, il ne faut jamais banaliser le sexisme ! »

Devenue la première footballeuse professionnelle à obtenir un doctorat en psychologie en 2016, Mélissa Plaza a raccroché les crampons en mai dernier, à l’âge de 28 ans. Fervente défenseure de l’égalité homme-femme sur les terrains, et en dehors, la native de Haute-Garonne accompagne désormais les entreprises ainsi que les institutions éducatives et sportives dans leurs politiques de mixité-diversité. Rencontre.

 

 

Comment avez-vous vécu la fin de votre carrière footballistique ?

Les premières semaines ont été dures ! Ce n’était plus raisonnable de continuer pour des raisons de santé, suite à ma blessure aux genoux. Après plusieurs opérations des mois de rééducation, il fallait absolument que j’arrête le haut niveau pour me préserver. C’est tombé pile au moment où j’avais fini mes études, bouclé ma thèse sur les stéréotypes sexués dans le sport, et que je me voyais (enfin !) ne faire que du football pendant quelques années. Ce ne fut pas une décision facile à prendre, le football c’est tout ma vie, une vraie passion depuis toute petite !

 

Quels souvenirs gardez-vous de vos années de sport-études en Vendée, dans le club de La Roche-sur-Yon ?

Ce fut certainement la plus belle période de ma vie. J’y ai fait des rencontres incroyables, j’y ai trouvé des amis, une famille, de nouveaux modèles. J’y ai découvert les valeurs de la vie, et on va dire que d’une certaine manière, c’est le foot qui m’a sauvé d’un environnement familial compliqué, qui m’a fait grandir. Le football, c’est ce qui m’a toujours tiré vers le haut et qui fait de moi ce que je suis aujourd’hui. 

 

Vous avez continué vos études pendant votre carrière professionnelle, pourquoi ?

C’était un équilibre important pour moi, même si cela détonnait un peu dans le paysage. J’étais impliquée dans les deux projets de la même manière, ce que certain(e)s avaient du mal à comprendre. Je suis une hyperactive donc cela me convenait très bien. J’ai aussi vite compris que le football, malgré le professionnalisme, ne me permettrait pas d’en vivre, notamment après ma carrière. C’est une vie de sacrifice. Sur le plan financier, il faut avouer que ça reste compliqué quand on ne joue ni à Lyon ni au PSG ou dans quelques rares autres clubs comme Montpellier ou Juvisy. Vivre d’un salaire en foot pro féminin, ce n’est pas facile. Il faut se rendre compte que beaucoup de joueuses évoluant en D1 ou D2 vivent dans la précarité. Certaines gagnent 800 euros bruts par mois, cumulent les petits boulots. Il est important d’alerter sur cette situation et d’accompagner au mieux les footballeuses dans leur projet de reconversion.

 

Pouvez-vous justement nous parler de votre vie après le football ?

Je ne quitte pas complètement les terrains puisqu’après avoir passé mon diplôme d’entraîneure, j’occupe depuis la rentrée le poste d’adjointe des Diablesses, l’équipe féminine de l’Union Sportive de Saint-Malo, mon dernier club. J’ai envie de transmettre tout ce que j’ai appris, et de rendre ce que le monde du football a pu m’offrir. Le haut niveau m’a enseigné la rigueur, le perfectionnisme, le goût intarissable de l’effort, la capacité de rebondir malgré les échecs… J’ai aussi envie d’aider les filles à trouver leur place, j’aime aller au front de par mon tempérament, hors de question qu’elles soient la dernière roue du carrosse !

 

Vous avez aussi créé un cabinet de conseil et de formation, « Queo Improve by equality », pour accompagner les entreprises sur le chemin de l’égalité.

Oui, tout à fait. J’apporte mes connaissances scientifiques et empiriques pour déconstruire les stéréotypes de genre, mais aussi pour faire de l’égalité une réalité et non un vœu pieux. Mon expérience de footballeuse me permet d’incarner le sujet, je partage mon vécu, mes expériences sur le terrain, les commentaires sexistes reçus sur les réseaux sociaux… Je ne suis jamais dans le jugement, j’aime trouver des leviers pour susciter des prises de conscience, pour que les femmes osent en parler et que les hommes, notamment les managers et les dirigeants, ne soient plus dans le déni. A l’école, sur les terrains de sport comme en entreprise, il ne faut jamais banaliser le sexisme !

 

Pour aller plus loin, regardez la vidéo TedX De Mélissa Plaza « Désolée ma puce, ça n’existe pas pour les filles ! », réalisée à St-Brieuc en septembre 2016.

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