Manel Fayouka, la locomotive du football féminin

Ancienne joueuse de football en Tunisie, Manel Fayouka est arrivée en France en 2006 du côté d’Angoulème. Après avoir découvert l’ASJ Soyaux et passé un diplôme d’entraîneur, cette hyperactive modèle d’intégration a créé il y a quelques semaines la première équipe féminine de son quartier. Portrait.

 

 

 

Depuis quelques semaines, dans un quartier difficile d’Angoulème, Ma Campagne, le football féminin et le sport féminin au sens large prennent vie. Après la remise en route de la salle de sport da la MJC au printemps dernier qui lui a permis d’obtenir un contrat aidé avec le centre, Manel Fayouka a créé une équipe féminine de football fin novembre.

Le sport comme mot d’ordre

Cet automne, Manel Fayouka se rend compte que la plaquette de présentation de la MJC propose du football féminin mais que dans les faits rien n’existe. Femme de challenge, cette mère tunisienne de trois enfants pose les fondations de la première équipe de football féminin du quartier. Grâce au bouche à oreille, 14 filles, âgées de 10 à 16 ans, sont présentes au premier entraînement fin novembre. « Mon objectif avec cette équipe c’est d’occuper les filles du quartier, qu’elles ne traînent pas dehors, leur faire découvrir un sport », reconnaît cette éducatrice de 33 ans. Très vite, elle met en place une entente pour les catégories U14 et U17 avec le club de la Couronne, autre quartier d’Angoulème : « Je voulais que mes joueuses puissent avoir l’occasion de participer à des matches et surtout rencontrer d’autres jeunes filles issus d’un autre quartier ». Lors des premiers exercices, chacune reste dans son coin. Mais au bout de quelques sessions les joueuses en redemandent. Désormais, chaque semaine, un entrainement sur deux se passe chez le club ami.

 

Dans le quartier, l’apparition de cette section féminine a quelque peu surpris : « Les garçons étaient étonnés de voir des filles jouer au foot, c’etait dur les premiers jours. Désormais, la cohabitation se passe bien. Ils ont conscience que les filles ont leur place sur un terrain de football, qu’elles peuvent, elles aussi, jouer comme eux ». Passée l’euphorie de la création, Manel ne veut pas s’arrêter là. Elle se fixe deux nouveaux objectifs : participer au championnat départemental avec son équipe de Ma Campagne, puis créer une école de football féminin. Elle doit d’ailleurs avoir une réunion à ce sujet à la Ligue régionale dans les prochains jours.

 
Un modèle d’intégration

Ce parcours dans le football charentais n’a rien de surprenant en réalité. Pour mieux le comprendre, il faut revenir dix ans en arrière. Issue d’une famille de footeux et ancienne joueuse en Tunisie, arrivée en 2006 en France pour un regroupement familial, Manel Falouka découvre le club de Soyaux en 2008. Elle débute par des stages d’aide éducateur et participe aux entraînements de l’école de football des U7 et U9. Séduite par l’approche du terrain, elle décide de passer sa formation d’initiateur 1. Un diplôme obtenu qui débouche sur un premier contrat aidé de six mois qui se transforme en deux ans d’activité au service de l’ASJ : « Je me suis découvert une passion pour le métier d’entraîneur, j’apprécie être au contact des enfants, des parents, avoir ce lien social. Mes équipes, c’était un peu comme une famille ».

Après une pause congès maternité, cette hyperactive passionnée de sport ne peut pas tenir en place. Elle se dirige donc vers la MJC de son quartier à Angoulème. Mais trouve porte close. La salle de fitness est en quelque sorte à l’abandon, faute d’abonné(e)s. « J’ai tout suite dit à la responsable que j’allais m’inscrire et ramener du monde avec moi. J’étais la première femme inscrite de la salle et je ramenais même mon propre matériel ! Aujourd’hui nous sommes quarante ». La locomotive Manel semble avoir fonctionné à plein régime. Des femmes maghrébines qui n’osaient pas sortir de chez elles lui ont emboîté le pas, sac de sport sur le dos : « Beaucoup de femmes du quartier n’avaient que très peu de liens sociaux. Certaines avaient envie de faire du sport mais avec leur voile, elles n’osaient pas. J’ai donc créé un créneau spécial femmes. Mais la salle reste mixte et tout le monde peut cohabiter et s’entraîner ensemble ». Ensemble, c’est un mot qui revient souvent dans la bouche de Manel Fayouka. A l’image d’une équipe, elle ne coinçoit pas la vie pleine de solitude. A travers sa passion, l’éducatrice tente de passer un message. « Le football peut envoyer un message de tolérance. Ce sport montre que l’on peut se respecter, cohabiter en paix ». Dernière chose, après presque dix ans passés en France, elle compte enclencher les démarches pour être naturalisée. 

 

 

Crédit photo : ASJ Soyaux / charentelibre.fr

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