L’OL est-il devenu un frein au développement du football féminin français ?

Ultra dominateur en France depuis une décennie, l’Olympique Lyonnais a permis au football féminin français de faire un bond en avant à différents niveaux. On peut cependant se poser la question de la situation actuelle. Et si la domination lyonnaise était devenue un frein au développement du football féminin en France ?

 

 

 

Dix championnats, six Coupes de France, trois Ligues des Champions (plus deux finales)… la dernière décennie a été lyonnaise dans le football féminin français. Une domination qui ne souffre d’aucun débat, et qui a permis au club d’être moteur dans le développement de la discipline en France, que ce soit d’un point de vue sportif ou médiatique. Avec à sa tête un président visionnaire, Jean-Michel Aulas, qui a été le premier à véritablement se lancer à fond dans l’aventure football féminin, l’Olympique Lyonnais est une référence, en France, en Europe, et dans le monde. 

Seul club professionnel pendant plusieurs années, l’OL a eu le temps de se construire sur la durée et de se structurer. Aujourd’hui, il est compliqué de trouver un club où les choses sont mieux organisées qu’à Lyon. Par son fonctionnement au quotidien, mais également par son envie d’aller toujours de l’avant, anticipant sur l’avenir comme son recrutement depuis plusieurs années le laisse deviner. Le club dispose d’ailleurs dans son effectif de plusieurs futures stars mondiales. La domination de l’Olympique Lyonnais ne semble pas prête à s’arrêter. La situation actuelle soulève cependant une interrogation : et si l’OL, malgré lui, était devenu un frein au développement du football féminin en France ?

 

A Lyon, un cocon pourvoyeur de titres

Des salaires importants qui défient toute concurrence, une ville agréable et un groupe de joueuses de top niveau qui gagne des titres tous les ans. L’Olympique Lyonnais fait rêver les joueuses du monde entier, son aura allant bien au-delà des frontières françaises. Mais il fait également rêver en France, l’équipe comptant dans son effectif la majeure partie des meilleures joueuses françaises. Alors que le nombre de joueuses de très haut niveau est encore relativement faible dans le monde, mais également en France du fait d’une discipline en plein développement, l’Olympique Lyonnais compte parmi les meilleures joueuses de France quasiment à chaque poste (doublé bien sûr). Certains des plus grands talents, également, avec le recrutement de Griedge Mbock (Guingamp) ou encore Claire Lavogez (Montpellier) l’été dernier.

En ayant une telle mainmise sur les tops joueuses françaises (souvent depuis de nombreuses années), avec également certains des plus grands talents mondiaux et des joueuses étrangères clés, Lyon se donne les moyens de remporter tous les titres possibles. Le revers de la médaille, fort logiquement, est que ces joueuses, auxquelles il est impossible de proposer les mêmes conditions financières et professionnelles, ne sont pas dans d’autres clubs, et en conséquence, il est très compliqué pour les « concurrents » du club rhodanien de lui faire de l’ombre, voire impossible sur une saison complète, comme Juvisy, Montpellier ou le PSG ont pu le constater à leurs dépens, avec le sentiment d’impuissance qui en découle.

 

Compétitivité et concurrence

Dans l’impossibilité de disposer d’un nombre important des meilleures joueuses françaises, Juvisy, Montpellier et le PSG s’appuient principalement sur des anciennes internationales, des jeunes à potentiel et/ou des joueuses étrangères pour former leur équipe, ce qui peut leur permettre de poser des problèmes à Lyon sur un match ou deux, mais pas une saison entière. Dans un championnat déjà très hétérogène, il n’y a plus de suspense pour le titre de champion, cela même avant le début de la saison. Tout au plus les autres clubs peuvent espérer remporter la Coupe de France, jouée sur un match.

De ce fait, si voir une équipe remporter plusieurs titres nationaux, puis s’imposer sur la scène européenne a permis de grandes avancées dans le football français, une telle domination sur la durée ne peut tout simplement pas être positive pour l’intérêt du championnat et conquérir un public de non-avertis, par manque de concurrence et de compétitivité. Pour cette raison, le championnat français est logiquement moins attractif à l’heure actuelle que des ligues voisines comme en Angleterre, en Allemagne ou en Suède, sans parler des Etats-Unis.

Ce manque de concurrence et de compétitivité peut également avoir des conséquences en ce qui concerne l’équipe de France. Composée donc en majorité de joueuses de l’Olympique Lyonnais qui ne connaissent que peu, voire pas d’adversité durant la saison, l’équipe n’a toujours pas obtenu de titre au niveau international, ayant pris l’habitude de tomber lors de matches couperets -souvent dominés-, n’arrivant pas à se faire violence face à une adversité à laquelle les joueuses ne sont pas habituées, même si Philippe Bergerôo oeuvre en ce sens en multipliant depuis sa nomination des rencontres face à des adversaires de (grande) qualité.

 

Qui pour reprendre la marche en avant ? 

Que peut apporter de plus l’Olympique Lyonnais au développement du football féminin français ? A vrai dire, pas grand chose, même s’il reste à voir les apports de son prochain centre de formation, et s’il fera profiter l’entièreté de la France du football féminin. Le club dispose déjà d’équipes de jeunes parmi les toutes meilleures de France, mais il leur est compliqué de se faire une place au sein de l’effectif rhodanien (seules Wendie Renard et Amel Majri y sont parvenues ces dix dernières années) et rares sont celles qui arrivent à quitter Lyon pour atteindre l’équipe de France.

Pour que les compétitions nationales retrouvent de l’intérêt et de la compétitivité, c’est donc aux concurrents de tenter de se hisser au niveau de Lyon, pas à pas. Les premiers concernés, Juvisy -avec des moyens limités-, Montpellier et Paris qui ont réussi à se montrer embêtants, ponctuellement. Ensuite, la montée d’équipes portées par des clubs professionnels masculins, parce qu’il ne faut pas se leurrer, concurrencer Lyon passera par de gros investissements financiers. Dans ces deux cas, le délai pour une plus grande concurrence est inconnu. Et avec la certitude que ce sera à l’ombre de l’OL, quelle est la motivation de tous ces clubs, alors que la mission semble très compliquée et demandeuse d’efforts très importants ?

 

Organisation parfaite, gestion et recrutement intelligents, anticipation… l’Olympique Lyonnais, seul ou presque, a pu se construire dans la durée et est devenu un modèle à tous points de vue. Autrefois moteur du développement du football féminin en France, le club, du fait de son ultra-domination, de ses années d’avance, et de son emprise sur les meilleures joueuses françaises semble être désormais, et malgré lui, un frein au développement du football féminin français parce qu’il oblige les autres clubs à essayer de trouver des solutions pour faire grandir leurs meilleures joueuses, régulièrement pour les voir rejoindre ensuite l’OL (Griedge Mbock, Claire Lavogez, Jessica Houara d’Hommeaux, Kheira Hamraoui pour les plus récentes), les forçant ainsi à un renouvellement qui empêche la construction d’un effectif compétitif dans la durée. La situation ressemble quelque peu à une impasse actuellement, et c’est donc en priorité à des clubs comme le PSG ou Montpellier de se montrer malins pour rebooster l’intérêt de la discipline, en attendant un championnat concurrentiel qui porterait l’ensemble du football féminin français vers le haut.

 

 

Crédit photos : OLWEB

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