Dix athlètes réfugié(e)s forment une équipe officielle aux Jeux de Rio

Quatre femmes et six hommes, encadrés par douze officiels, ont été sélectionnés pour les Jeux olympiques d’été 2016. Ils et elles composent la première équipe de personnes réfugiées à participer aux Jeux. Et comme toutes les équipes officielles, ces dix athlètes défileront avec leurs pairs lors de la cérémonie d’ouverture, mais sous la bannière du drapeau olympique.

 

 

Athlètes réfugiés ou réfugiés athlètes ?

La sélection définitive des athlètes réfugiés, ou des réfugiés athlètes, s’est opérée selon un triple critère : aptitude sportive (de vrais athlètes), situation personnelle (un vrai déracinement) et authenticité du statut de réfugié. Sur les 43 athlètes réfugiés potentiels identifiés par le Comité international olympique (CIO), par moins de 23 athlètes « résident » dans le camp de Kakuma, au Kenya. Là-bas, ces sportifs ont bénéficié d’un programme d’accompagnement supervisé par l’ancienne marathonienne kényane Tegla Loroupe, détentrice de plusieurs records du monde et membre de l’organisation Peace and Sport. Ils sont donc capables de performances sportives même si celles-ci n’atteindront probablement pas les standards des meilleurs mondiaux.

Mais c’est le Soudan du Sud qui aura fourni la moitié du contingent finalement retenu pour les Jeux, avec trois réfugiés et deux réfugiées. Le deuxième pays le plus représenté à travers la délégation officielle de réfugiés est la Syrie, avec un athlète de chaque sexe. Les trois autres athlètes réfugiés ou déplacés sont originaires de l’Éthiopie et de la République démocratique du Congo chez les hommes, de la République démocratique du Congo aussi chez les femmes.

 

Yusra Mardini, une nageuse pas comme les autres

La délégation officielle aurait pu compter une onzième personne réfugiée, mais celle-ci a choisi de concourir pour son pays d’accueil, l’Allemagne. Preuve que le déracinement peut aussi aboutir à un enracinement prometteur. Le cas de cette onzième personne illustre le drame de ces gens désignés, d’une manière trop réductrice, sous l’appellation de « migrants ».

Car la « migration » de Yusra Mardini tient plus de la périlleuse dérive d’Ulysse que du voyage d’agrément. La jeune nageuse, aujourd’hui âgée de 18 ans, a fui sa Syrie natale en passant par la Turquie. Suite à l’avarie de son embarcation, elle a tracté l’esquif et ses dix-huit passagers à la seule force de sa nage pour rejoindre la côte grecque. Un entraînement involontaire pour les Jeux olympiques, en somme. Après avoir traversé la moitié de l’Europe en train, la jeune femme a été accueillie en Allemagne, où elle réside aujourd’hui et se spécialise sur le 200 m nage libre.

À noter qu’un nageur syrien, Rami Anis, réfugié en Belgique, fait partie de cette première « équipe de réfugiés ». Alors qu’elle faisait partie des personnes initialement retenues, la taekwondoïste d’origine iranienne Raheleh Asemani a choisi de concourir pour la Belgique, dont elle a obtenu la nationalité en avril 2016.

 

 

Fauchés, mais combatifs

Six athlètes réfugiés sont inscrits dans une course d’athlétisme. Les Sud-Soudanaises Anjelina Nada Lohalith et Rose Nathinke Lokonyen participeront respectivement au 1 500 m et au 800 m olympiques. Leurs trois compatriotes sont engagés sur le 400 m (James Nyang Chiengijek), le 800 m (Yiech Pur Biel) et le 1 500 m (Paulo Amotun Lokoro). Enfin, l’Éthiopien Yomas Kinde est sélectionné pour le marathon.

On remarquera aussi que deux athlètes originaires de RDC, qui ont élu domicile au Brésil, tenteront d’obtenir une médaille olympique en judo. Popole Misenga s’exprimera dans la catégorie des moins de 90 kg et sa compatriote Yolande Bukasa Makika participe à la compétition chez les moins de 70 kg.

Huit athlètes de la délégation des réfugiés concourront donc soit dans le sport qui nécessite le moins d’équipement personnel (la course à pied), soit dans un sport qui exige de savoir se battre (arts martiaux). Peut-être faut-il y voir une double métaphore du dénuement et de la guerre. L’origine géographique des dix sportives et sportifs illustre le contexte humain et humanitaire dramatique dans ces pays, mais aussi l’absolue nécessité d’une véritable solidarité internationale, afin de mettre un terme à cette situation effroyable et aux déracinements qu’elle engendre. Que le Soudan du Sud et la Syrie soient les pays les plus fortement représentés dans la délégation des réfugiés n’est pas le fruit du hasard : ces deux pays sont en proie à une guerre civile, c’est-à-dire à la destruction d’un peuple par lui-même, avec la complicité passive des autres peuples.

 

Un message d’espoir

Seuls des actes et des valeurs de tolérance et d’humanité paraissent susceptibles d’endiguer les conflits générateurs de haine, de mort et de déracinement. Le sport et les Jeux olympiques font partie de ces pacificateurs potentiels. En accueillant pour la première fois une délégation officielle d’athlètes réfugiés ou déplacés, le CIO adresse un message d’espoir aux réfugiés, mais aussi un signal fort à la communauté internationale. À la fin de l’année 2014, on dénombrait 59,5 millions de personnes réfugiées, déplacées ou demandeuses d’asile à travers le monde. Un chiffre en constante augmentation, dont la condescendante appellation « migrants » ne saurait taire la terrible réalité, les drames personnels et la nécessité vitale de cette « migration ».

La délégation d’athlètes réfugiés a-t-elle une quelconque chance de remporter des médailles ? Bien malin ou chanceux qui saurait le prédire. Seule certitude, les athlètes réfugiés seront accueillis comme des rois, ou plus exactement comme des ROA : Refugee Olympic Athletes.

 

 

Sur le même sujet : un documentaire de France 24 : Les Jeux olympiques des réfugiés

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