«Divinement foot» : entre religion, foot féminin et plaisir des fans

Depuis fin avril, à Lyon, au Musée Gadagne, se déroule l’exposition «Divinement foot». Une galerie sur le foot, destinée aux fans mais pas que, puisqu’elle revient sur la dimension sacrée du sport, mais aussi sur la place des femmes dans celui-ci. Éclairant.

 

 

 

 

C’est sur les bords de la Saône, près de la gare Saint-Paul, qu’à lieu depuis le 27 avril et jusqu’au 4 septembre, l’exposition «Divinement foot». « Il y a 3-4 ans, un projet d’exposition sur le football a émergé au sein de notre réseau de musée d’histoires de ville (Amsterdam, Barcelone, Brême), et pour lequel nous nous sommes portés volontaires. Le projet initial a été lancé par les musées d’Amsterdam et du Luxembourg, et depuis le projet tourne en Europe et s’arrête chez nous cet été. On a retravaillé la trame proposée en adaptant la moitié du propos avec des exemples lyonnais voir des exemples entièrement dédiés à Lyon», explique Anne Lasseur, l’une des deux commissaires de l’exposition, et responsable du service des collections au musée. Afin de l’épauler, Vincent Duluc, journaliste à l’Equipe, est venu apporter sa science du football, et a lui aussi endossé le costume de commissaire. «La ville de Lyon est venue me chercher il y a à peu près un an et demi, pour me demander si j’étais intéressé par cette idée. J’ai commencé par rencontrer le directeur Xavier de la Selle, puis j’ai surtout travaillé avec Anne Lassoeur. Ce sont des gens qui n’avaient pas une grande culture foot, ni de l’histoire de l’OL, donc mon rôle ça a été de rapprocher les deux mondes, raconter des histoires qui puissent les intéresser», explique donc l’ancien journaliste du Progrès, à propos de celle qui s’est depuis «convertie» au foot.

 

Le rapport à la religion, justement, est l’un des sujets proéminents de ce projet. «Le principe de l’expo, c’est de s’intéresser au football comme un fait de société, rappelle Anne Lasseur. On s’est intéressé à toutes les pratiques sociales qui ont lieu autour du foot. La grille proposée c’est de se demander «et si le football était une religion moderne ?». Et à partir de ça, analyser le foot et ses pratiques dans la société occidentale aujourd’hui, sachant que le foot est vraiment le 1er sport pratiqué au monde, sur tous les continents, donc que c’est une pratique universelle, par rapport à la société contemporaine» décrit-elle. «On voit bien qu’il y a un tas de parallèles entre les fidèles, les rituels, les idoles, les valeurs, les lieux du culte. On parle souvent des stades comme des cathédrales. D’ailleurs, c’était le surnom de San Mamès à Bilbao. Même dans le langage courant, nous, journalistes, parlons de gardiens crucifiés, de garçons qui cherchent la rédemption, de la communion avec le public, il y a tout un pan de sémantique qui se rapporte à la religion», poursuit Vincent Duluc.

 

Une exposition centrée aussi sur le foot féminin

Parmi ces problématiques, celle du foot féminin occupe une place importante du musée. « Pour comprendre la place du foot à Lyon dans l’histoire, il faut déjà constater deux choses : le foot à Lyon existe depuis plus de 100 ans, il y a une équipe de Lyon qui a été finaliste de la première coupe de France en 1918, l’OL existe depuis 66 ans, mais en même temps, Lyon est pionnier dans le foot féminin », analyse le journaliste. «La partie sur le foot féminin, on y tenait beaucoup, puisque ça a une dimension récente, et quand on a réfléchi un peu sur ce qui faisait l’identité du foot à Lyon, il y avait la place des femmes, et notamment la qualité de l’équipe lyonnaise» complète sa collègue.

Une équipe qui fait désormais partie du patrimoine lyonnais, même si des progrès sont à faire : « Cela m’a l’air compliqué de faire croire à quiconque que ça a une place aussi importante que les hommes, reconnait Duluc. En revanche, c’est une vraie place du foot féminin. Il y a beaucoup de gens qui supportent les hommes et les femmes, et qui vont voir des matches des deux. Le problème du foot féminin, c’est qu’il n’y a pas beaucoup de rendez-vous qui ont du «sens». C’est-à-dire que si vous n’êtes pas un fan absolu, vous pourrez aller voir Paris, Montpellier ou Juvisy, mais moins Rodez par exemple…. Mais les filles sont de plus en plus médiatisées. Sur OL TV par exemple, les femmes ont une vraie place, et ça permet de les ancrer dans le paysage », poursuit-il. De là à les imaginer un jour portées au rang d’idoles ? « Pour l’instant, elles ont juste l’image de joueuses de haut niveau. Ce qui n’est qu’une partie de la reconnaissance. Pour qu’il y ait une «iconisation», il faut rentrer dans un autre domaine. Il faut être des stars, il faut se comporter tel quel, avec les bons et les mauvais côtés. Pour l’instant, pour les gens, les filles représentent les valeurs un peu perdues du foot. C’est à la fois une chance et aussi une limite, parfois. Il y a un moment, il va falloir mal se comporter, comme les hommes (rires) », plaisante le journaliste de l’Equipe.

Des limites qui ne sont pas non plus un handicap pour la conservatrice : « Il y a un vrai relationnel entre les supporters et les joueuses, il y a une proximité de relation qu’on ne voit plus avec les garçons. Et je pense que ça fait une grande différence par rapport au plaisir du jeu et de la proximité qu’on a avec les joueuses, de les connaitre. Cela modifie la perception et l’adhésion à l’équipe qu’on supporte. Aujourd’hui avec l’équipe masculine c’est terminé, alors qu’on a toujours ça avec les filles. Cette simplicité de rencontre, c’est ce qui fait, à mon avis, l’adhésion des supporters à l’équipe féminine ».

 

De nombreuses activités pour les fans

Un rapport que les fans et les autres pourront revivre au musée Gadagne, qui leur consacre aussi beaucoup d’activité, comme la possibilité de créer sa propre vignette Panini, ou encore des pans du musée pour expliquer l’amour porté aux fans par leur équipe : « Que les visiteurs internationaux le visitent, oui, mais c’est un aussi un endroit pour les Lyonnais, où on a fait rentrer les supporters aussi. A l’entrée il y a de supers documentaires sur l’expérience de 6-7 personnes au stade, dont Sydney Govou. Une activité très intéressante que je conseille à tous ceux qui ont envie d’aller à l’exposition », s’enthousiasme Vincent Duluc. « Ce n’est pas notre public traditionnel donc on se demandait comment ils allaient rentrer dans le sujet, explique Anne Lasseur. Et en fait, on se rend compte que tout le monde s’y retrouve dans cette exposition. Aussi bien des passionnées de foot qui mettent en perspective leur pratique du sport, et ceux qui n’y connaissent rien, qui viennent un peu «en se pinçant le nez» mais qui se rendent compte qu’ils sont confrontés à un fait social majeur ». Et dont la victoire de l’OL en Ligue des champions devrait aider à accorder une place plus importante aux femmes.

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