Bundesliga : Bibiana Steinhaus cartonne

L’arbitre allemande, qui va devenir ce dimanche la première femme à arbitrer une rencontre de l’élite chez les hommes outre-Rhin, enchaîne les performances réussies, sifflet en bouche. Sa percée pourrait avoir un impact inédit dans le monde du ballon rond.

 

 

 

 

 

 

 

L’Olympiastation, ce stade de 74 000 places qui trône à l’ouest de Berlin, va devenir ce dimanche le théâtre d’un match historique. A première vue, rien de bien passionnant pour le quidam dans cette rencontre entre le Hertha Berlin et le Werder Brême (coup d’envoi à 15h30), respectivement 9e et 18e de Bundesliga, avant cette 3e journée de championnat. Et pour cause, les vingt-deux acteurs à la lutte pour se disputer les trois points, ne vont pas spécialement faire entrer cette rencontre dans l’histoire. Mais c’est bien la 23e actrice, dirigeant les deux équipes, sur qui tous les projecteurs seront braqués.

 

Arbitre la plus médiatisée – et sûrement la plus talentueuse – dans le monde, Bibiana Steinhaus s’apprête à devenir, en ce mémorable 10 septembre 2017, la première femme de l’histoire à être aux commandes d’un match de division supérieure masculine. L’évènement ne devrait pas, somme toute, se révéler exceptionnel, mais la portée va sûrement faire avancer la cause de l’arbitrage féminin dans le foot. « Pour moi et pour mes collègues arbitres, le fait que je sois une femme n’a plus rien d’extraordinaire depuis longtemps. Mais il nous faut accepter le fait que, pour le grand public, c’est encore quelque chose d’exceptionnel », expliquait-elle ainsi lors de l’officialisation de sa participation au match cette semaine.

 

Succès précoces en natation et courte vie de footballeuse

Du succès, cette femme de 38 ans, originaire de Lauterberg en Basse-Saxe, en a moins connu lors de sa première vie sur les terrains. C’était en tant que joueuse, sous les couleurs du club de sa ville, où elle a joué à partir de 14 ans, après avoir vécu une (jeune) carrière de nageuse, beaucoup plus réussie (elle a notamment participé aux championnats nationaux). A l’époque, elle évolue au poste de défenseure centrale : « Où d’autre auriez-vous mis une joueuse grande (elle mesure 1,81 mètre, ndlr), rapide et qui ne savait pas très bien se servir du ballon ? », interrogeait-elle ainsi en 2011 le Hannoversche Allgemeine Zeitung.

 

Désormais connue comme étant « Bibi », mais surnommée « la petite Rien », en référence au nom de jeune fille de sa mère, sur ses terres, elle ne s’épargne jamais lors d’interviewes : « J’ai connu beaucoup de joies dans le foot, mais ma carrière en tant que joueuse n’a pas été très fructueuse, avouait-elle ainsi à Fifa.com en 2015. Comme j’aime ce sport, j’ai essayé de continuer à évoluer dans celui-ci, mais dans un autre rôle ». Elle, qui a découvert les rectangles verts grâce à son père, lui aussi arbitre, décide donc d’emprunter la même voie que lui.

Dès 1995, toujours au sein du même club, elle enfile sa tunique jaune et noir, avant d’arriver, à 20 ans, en Bundesliga féminine quatre ans plus tard. En 2001, elle arbitre aussi ses premières rencontres masculines, en Division régionale, alors que tous les observateurs s’accordent à dire que ses performances sont remarquables. Son père, qui ne manque jamais un match de sa fille et dont elle est très proche, assure qu’elle a toujours été confiante. Même lorsque Bibiana était adolescente. Sa fermeté et son autorité l’amènent donc naturellement à se diriger vers la police, où elle travaille en parallèle à Hanovre.

 

 

 

Ce caractère lui permet d’être respectée sur le bord du terrain. Comme le jour où Pep Guardiola, alors coach du Bayern, visiblement déçu de voir la quatrième arbitre – fonction qu’elle exerçait au sein de l’élite allemande, dès la saison 2007-08 – ne pas lui accorder assez de temps additionnel, tente de l’attraper par le cou. Avant que Steinhaus ne repousse fermement le technicien catalan (voir ci-dessus). Pas de familiarité ! Cette dureté ne l’empêche pas d’afficher aussi parfois, lors d’un évènement impromptu avec un joueur, ou lorsque certains se permettent de lui faire une petite blague, quelques sourires. Ce fut le cas lorsque Franck Ribéry lui a enlevé ses lacets. C’était au cours de la rencontre de Coupe d’Allemagne, remportée par le Bayern (5-0) en août dernier face à Chemnitzer (voir ci-dessous).

 

 

 

Devenue arbitre FIFA depuis 2005, Steinhaus profite de ce mélange d’autoritarisme et de pédagogie pour faire monter sa cote, enchaînant depuis les grands rendez-vous internationaux. Euro 2009, Coupe du monde 2011, Jeux Olympiques 2012 (où elle arbitre la finale entre les Etats-Unis et le Japon, voir photo ci-contre), Mondial 2015… Plus une grande compétition n’a lieu sans que l’on n’aperçoive la blonde chevelure de l’Allemande. Pas étonnant donc qu’elle cultive une amitié forte avec l’Anglais Howard Webb, figure de l’arbitrage masculin.

 

Cette année, après avoir appris qu’elle était retenue parmi les 23 officiels sélectionnés pour arbitrer des matches de Bundesliga, elle a participé à la finale 100% française de Ligue des champions entre l’OL et le PSG, mais aussi à l’Euro aux Pays-Bas. Cette fois encore, c’est elle qui officiait lors de la finale, qui a vu les Bataves être sacrées. Et si la compétition a connu quelques (légères) controverses sur le niveau des arbitres, Steinhaus s’est montrée irréprochable.

 

Une nomination qui en appelle d’autres ? 

Arbitre allemande de l’année à six reprises (2007 à 2011, 2017), elle a également reçu le titre de meilleure « referee » du monde en 2013 et 2014, par l’IFFHS. Pour cette journée historique, Bibiana Stienhaus, soutenue notamment par l’international allemand Ilkay Gündogan, ne devrait pas trembler. « C’est une confirmation de tout le dur labeur accompli jusqu’ici, mais aussi une invitation à continuer de travailler », rappelait-elle ainsi sur le site de la Fédération allemande cette semaine.

 

C’est un message d’espoir, surtout, pour toutes ses homologues. Parmi lesquelles la Française Stéphanie Frappart (qui abritre jusqu’ici en Ligue 2) et, peut-être, le début de l’établissement de la parité hommes-femmes chez les arbitres dans le foot. Un monde à qui «Bibi» n’a, pour le moment, pas adressé le moindre carton.

 

 

 

Crédits photos : Capture d’écran twitter Ilkay Gündogan / Reuters / Women’s Soccer 

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